Podcast : Entretien avec Frederic Le Manach (réalisé par Sébastien Ferrage, Aubin Marteau, Julie Meyer, Maéva Paolini, Marceau Sylvain-Dutilloy et Coralie Zen)
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Creation date:
January 19th, 2021, 8:45 a.m.Add date:
January 19th, 2021, 8:45 a.m.Number of views:
35 (this month: 21)Speaker:
William DhuyvetterVisibility:
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Un podcast réalisé par l'équipe :
- Sébastien Ferrage,
- Aubin Marteau,
- Julie Meyer,
- Maéva Paolini,
- Marceau Sylvain-Dutilloy
- Coralie Zen
Textual transcription
Entretien réalisé par Sébastien FERRAGE, Aubin MARTEAU, Julie MEYER, Maéva PAOLINI, Marceau SYLVAIN-DUTILLOY et Coralie ZEN étudiant.es du Master 2 Gouvernance des risques environnementaux (RISE), promotion 2020-2021
Intitulé du podcast : « La surexploitation des ressources marines »
Invité : Monsieur Frédéric Le Manach
(Directeur scientifique de l’Association Bloom)
Marceau SYLVAIN-DUTILLOY : Bonjour, vous êtes Frédéric Le Manach, vous êtes directeur scientifique de Bloom, une ONG qui travaille pour la protection des ressources naturelles marines. Et nous, nous sommes un groupe de six étudiants du Master RISE et nous menons une série de podcasts sur la surexploitation des ressources marines. Je vais commencer par une première question qui peut peut être vous sembler évidente, mais qui n'est pas pour tous. Pensez vous que la pêche s'effectue d’une manière durable aujourd'hui en Europe ?
Frédéric LE MANACH : Alors effectivement, c'est une question qui est compliquée puisque ça dépend avant tout de la définition qu'on a de la pêche durable. Il faut savoir que dans le cadre de la Politique commune de la pêche, qui est le cadre de gestion européen de la pêche, qui est ensuite appliqué aux différents niveaux nationaux. On a une définition qui est assez productiviste puisque la pêche durable, ça veut dire que l'on maximise chaque année les captures sans mettre en danger la pérennité de la population de poissons. Donc, ce n'est pas du tout. Il n'y a pas du tout d'ambition environnementale ou de protection de la nature derrière. Il n'y a pas du tout d'ambition d'une allocation équitable, par exemple des droits de pêche. C'est vraiment uniquement de la maximisation de captures chaque année, sans que ça mette en péril le futur de la pêche. Quand on regarde vraiment uniquement cet indicateur là, on a une situation en Europe qui s'améliore, qui a été dramatique dans les années 90-2000 et qui, depuis quelques années, s'améliore puisqu'on en atteint cet indicateur là pour de plus en plus d'espèces, en tout cas d'espèces à forte valeur commerciale. En revanche, quand on regarde la manière dont c'est pêché et par qui. (1min47) Là, on n'a une (??) un peu plus importante puisque en Europe, on a toujours des méthodes de pêche qui sont beaucoup trop efficaces, qui sont non sélectives, qui sont destructrices. C'est le cas par exemple du chalut de fond, qui est une méthode qui utilise un filet en forme de chaussette, qui est lesté, qui va être traîné au fond de l'océan et donc ça c'est bien sûr, non sélectif. Et c'est aussi une méthode de pêche qui est destructrice puisque le filet étant traîné avec des chaînes métalliques ou des panneaux métalliques, on va avoir une destruction physique de l'habitat marin. Et donc ça, c'est une méthode de pêche qui peut permettre d'atteindre l'objectif de pêche durable selon la définition politique en Europe, mais qui ne correspond pas du tout à une pêche durable selon nos critères associatifs.
Marceau : Pour qualifier un stock durable, il faut forcément l'étudier. Est ce que vous pensez que les stocks de poissons sont assez suivis scientifiquement ?
Frédéric LE MANACH : Alors ça effectivement, c'est un autre sujet puisque, de savoir d'un point de vue scientifique, si, en stock, une population de poissons est à un niveau dans le rouge ou dans le vert (pour faire simple et imager le propos) il faut beaucoup de temps, il faut beaucoup d'argent, il faut beaucoup de moyens techniques et humains. Et c'est vrai que même en Europe, qui est quand même un bloc de pays très riches avec des capacités scientifiques énormes par rapport à la plupart des autres pays du monde, on a du mal à avoir des connaissances scientifiques suffisantes pour, en réalité, la plupart des espèces. En Europe, on suit à peu près 150 stocks de poissons, mais qui correspondent uniquement à 30 ou 40 espèces puisque, par exemple, en fait, en stock, c'est un mot qui est souvent décrié, mais qui correspond aussi à la réalité productiviste de la gestion de la pêche. C'est vraiment une commodité au sens propre, avec seulement deux stocks et en fait, un stock c'est une fraction d'une population, d'une espèce donnée à un endroit donné.
Et donc pour une espèce, comme par exemple le cabillaud, qui a une aire de distribution dans l'Atlantique Nord-Est, on a différents stocks, c'est à dire différentes unités de gestion. Par exemple en Islande, au large de la Norvège, en mer du Nord, en mer Celtique ou dans la Manche. Et donc, chaque stock est une unité de gestion distincte avec des quotas distincts. Mais c'est la même espèce. Et donc, en fait, ça, ça nous dit aussi qu’en Europe, on a mis de l'argent, forcément d'abord sur les espèces à forte valeur commerciale. Donc, ça va être le cabillaud, ça va être le hareng, ça va être la plie, ça va être des espèces comme ça. Mais pour la majorité des espèces que l'on trouve dans les écosystèmes marins européens, et qui sont aussi également pêchées par des pratiques de pêche comme le chalut de fond, on n'a pas d'information. Et on n'a pas d'information aussi, y compris pour certaines espèces que l'on retrouve sur les étals de poissonniers assez communément. Par exemple le lieu, c'est une espèce qu'on retrouve communément dans la grande distribution et sur les marchés, pour laquelle on a très peu d'informations scientifiques.
Marceau : D'accord. Et on a également des stocks qui sont suivis scientifiquement mais qui sont étudiés sans indicateur de durabilité aussi.
Frédéric LE MANACH : Exactement. En fait, on a vraiment différents niveaux de connaissances sur les stocks, selon par exemple, si on va baser notre évaluation sur des captures commerciales ou sur des suivis scientifiques indépendants. En fait, on a une qualité de données qui est différente et parfois, on va aussi être amené à produire des avis sur la quantité durable de poisson qu'on peut prélever chaque année sans avoir d'information particulièrement bonne et suffisante pour le faire. C'est vrai que parfois, on a l'impression que la gestion de la pêche en Europe, qui est quand même quasiment exclusivement gérée par cette approche des quotas, est un peu faite au doigt mouillé parce qu'on a pour une grande partie des espèces on a assez peu d'informations. Le problème il est encore plus évident quand on prend en compte, par exemple, de nouveaux problèmes émergents comme le changement climatique, qui a un impact très important sur la distribution des populations de poissons, puisque les populations de poissons vont migrer selon la température de l'eau pour rester dans des eaux qui leur sont les plus favorables. Et donc, on se retrouve aussi maintenant de plus en plus avec, d'une part, des avis scientifiques qui ne sont pas forcément respectés lors de la prise de décision ministérielle, puisque la décision sur les quotas en Europe est avant tout une décision politique prise par les ministres. Et en plus, on a des avis sur les quotas qui sont donnés pour des zones qui ne correspondent plus à la réalité biologique des différentes espèces à cause du changement climatique. Ça explique aussi pourquoi nous, au sein de l'association Bloom, on ne s'intéresse pas plus que ça aux quotas. Pour nous, c'est un outil de gestion qui est indispensable, on a besoin d'établir des quotas pour limiter la quantité de poissons qu'on pêche. Mais pour nous, on a surtout besoin de déterminer comment on pêche ce quota et qui pêche ce quota.
Marceau : Alors justement sur le travail de l'association Bloom. On souhaitait que vous développiez un petit peu les travaux en cours ou récemment terminés par l'ONG Bloom. On a regardé sur le site, par exemple, la campagne que vous faites pour la consultation publique au sujet de la FEAMP, qui finance des industriels de la pêche intensive. Est-ce que vous pourriez peut être nous expliquer brièvement ce qu'est la FEAMP et à qui, selon vous, la subvention devrait elle être distribuée?
Frédéric LE MANACH : Alors, ça effectivement le FEAMP c'est un acronyme qui signifie Fonds Européen pour les Affaires Maritimes et la Pêche. On a rajouté aussi un A pour inclure l'aquaculture, donc c'est FEAMPA. Et donc, c'est le fond structurel. C'est en gros l'équivalent pour la PAC de l'outil de financement de la pêche en Europe. Et donc, on a une enveloppe qui est déterminée au niveau européen, qui là, pour la période 2021-2027, va être d'à-peu-près 6 milliards d'euros qui vont ensuite être distribués selon les Etats membres, selon la capacité de pêche de ces Etats membres. Et donc on a l'Espagne, la France qui sont vraiment dans les pays plus gros bénéficiaires. Et donc, le combat sur ce fond structurel, c'est que l'encadrement soit suffisant pour que les méthodes de pêche qui sont destructrices, que ce soit des habitats marins ou des emplois parce qu'elles sont trop efficaces, ne bénéficient plus de subventionnement. Et qu'au contraire, on arrive à faire émerger un modèle de pêche qui met en avant les méthodes de pêche les plus vertueuses d'un point de vue de l'emploi, mais aussi qui préserve au maximum l'environnement marin. Et pour nous, c'est vraiment la mère de toutes les batailles qui a été clairement identifiée d'un point de vue scientifique depuis maintenant vingt ou trente ans.
Le fait que l'argent public sert à alimenter un cercle vicieux, c'est une surprise pour personne. Et donc, on a vraiment besoin si on veut avoir une pêche durable à notre sens, c'est-à-dire une pêche qui ne détruit pas l'habitat marin, qui répartit équitablement les droits de pêche, qui valorise le poisson pêché et pas simplement une pêche durable au sens productiviste du terme, on a besoin simplement de couper le robinet à ces méthodes qui sont les plus efficaces, les plus destructrices, les plus énergivores, pour laisser la place à l'autre modèle d'émerger. Et malheureusement, on voit que ce n'est pas du tout ça qui est en train d'être enclenché en Europe, puisque là, le Conseil de l'Union européenne, c'est-à-dire les ministres de la Pêche, où que ce soit le Parlement européen, les élus qui siègent à Bruxelles, ont tous validé l'autorisation ou le renforcement de subventions qui vont alimenter la surpêche, par le biais de la construction de nouveaux navires, par le biais de la motorisation, remotorisation de navires déjà existants, sachant que l'on subventionne aussi déjà le carburant, qu'on subventionne aussi déjà l'accès à certaines zones, par exemple en Afrique dans le cadre de l'accord de pêche. Et donc, on a effectivement actuellement un modèle économique qui repose sur des subventions qui maintiennent, même si ça va au-delà de ça, un modèle néfaste. Mais en fait, ça assoit vraiment la domination de ce modèle néfaste en empêchant l'émergence d'un modèle plus vertueux
Marceau : Pour éviter, peut être que ce modèle néfaste ne croît, est-ce-que l'intervention des labels qui eux, sont plutôt du côté consommateurs peuvent avoir un effet. J'ai vu sur le site de Bloom que vous décriez plutôt comme l'utilisation du label MSC. Mais est-ce que vous croyez en la responsabilité des consommateurs sur ce sujet, sachant que certains poissons qui vont être importés ou alors pêchés de manière non durable vont coûter moins cher au consommateur?
Frédéric LE MANACH : Il y a deux questions dans la question, mais évidemment que l'on croit à la responsabilité des consommateurs, des citoyens. Et personnellement, je connais personne qui se lève le matin en se disant : “ Aujourd'hui je vais détruire la planète”. C'est aussi une question de sensibilisation, de pédagogie, de connaissances. On n'arrivera pas à inverser la marche morbide de l'humanité si on n'augmente pas nos capacités à éduquer les gens. C'est aussi dans cette optique que le travail de l'association Bloom s'inscrit. Et effectivement sur le papier en tout cas, les labels pourraient être un outil important pour les consommateurs parce que ça pourrait leur donner une information sur ce qui est durable ou non. Le problème, c'est que le label MSC, que vous avez cité, qui est le label archi dominant qu'on retrouve partout, n'a pas du tout une vision qui correspond à la nôtre sur ce qu'est la pêche durable. Et notamment dans le cahier des charges du label MSC, les seules méthodes de pêche qui sont interdites, c'est le poison et l'explosif, mais tout le reste est potentiellement certifiable MSC Pêche durable. Et ça, pour nous, c'est un gros problème. Et on a ensuite aussi un problème de l'application du cahier des charges puisque une entreprise de pêche qui souhaite se faire certifier par le MSC va choisir et rémunérer un cabinet d'audit comme Bureau Veritas, par exemple, qui va ensuite décider si leur client qui les a choisi et rémunérés, rentre ou non dans le cahier des charges. Et donc on se retrouve dans une situation où il y a quand même un conflit d'intérêts relativement bien qualifié puisque celui qui juge est rémunéré par celui qu'il doit juger.
Et donc cela explique pourquoi, quand on regarde au delà de la communication et des images mises en avant par le MSC, on se retrouve avec de la pêche profonde au chalut de fond qui est certifiée MSC, c'est par exemple une méthode de pêche à quoi qu'on a réussi à faire interdire en Europe, mais qui est pratiquée par exemple en Nouvelle-Zélande. Cette méthode là est certifiée “ MSC pêche durable ”. La réduction de poisson en farine et en huile pour les besoins de l'aquaculture de saumons, c'est aussi quelque chose qui est certifié “ MSC pêche durable ”. La pêche de krill en Antarctique, alors que c'est l'espèce clé de voûte de cet écosystème ultra fragile est encore à peu près vierge est certifiée MSC Pêche durable. En fait, on a des exemples comme ça par dizaines, de pêcheries que nous, on juge absolument pas durables, qui sont vendues auprès du consommateur comme pêche durable. Et donc là, on a effectivement un problème de compréhension de ce qu'est la pêche durable et de sensibilisation, puisque un citoyen qui veut bien faire les choses, s'il n'a pas l'information qui lui dit que le label MSC est trompeur et mensonger, bah il va lui faire confiance. Il va croire bien faire, alors qu'en fait, il va soutenir la pêche industrielle destructrice. Donc, pour nous, le citoyen, le consommateur, il a une responsabilité, mais c'est pas lui qui est fautif. S'il a la bonne information en main, il va faire en général le bon choix. Et donc la responsabilité, elle est avant tout politique et industrielle. Et pour la deuxième partie de la question par rapport au coût de la pêche industrielle versus le coût de la pêche artisanale : C'est vrai que ça revient souvent et on nous dit souvent que l'on a une vision un peu utopique et que l'on ne va pas alimenter l'humanité avec de la pêche durable. Alors, c'est vrai dans certains côtés, mais quand on regarde vraiment les chiffres, c'est pas si vrai que ça puisque, par exemple, il y a beaucoup des captures qui sont réalisées chaque année, qui sont gaspillés à cause de procédés industriels. Et donc, ce poisson là, on pourrait très bien imaginer, soit le laisser dans l'océan, soit le valoriser d'une autre manière. Et donc par exemple, en Europe ou en Amérique du Nord, on n'a pas besoin de consommer 30 kilos de poissons par an. C'est faux. On pourrait en consommer beaucoup moins. Mais surtout, on a la capacité, on le sait, et c'est démontré jour après jour par les pêcheurs artisans, qu’on est capable de valoriser tout le poisson qui est pêché. Et donc d'avoir par exemple 10% des captures annuelles qui sont débarqués par dessus bord, mort, ce n'est pas quelque chose qui est pour nous acceptable.
Et quand on regarde le coût final pour la société, en fait la pêche industrielle, elle coûte cher. Elle coûte cher, pourquoi ? Parce qu'elle est archi subventionnée. Même si le prix du poisson industriel apparaît comme moins élevé que du poisson qui est pêché de manière artisanale. Elle, la pêche artisanale, n'est pas subventionnée. Le deuxième point, c'est qu’en fait quand on regarde à qualité ou quantité équivalente, et là, je vais vous donner un exemple très concret : la pêche artisanale coûte très cher et donc je vais prendre deux exemples qui sont vraiment à l'opposé l'un de l'autre. Le poisson le plus cher de pêche artisanale à Paris, par exemple, ça va être le bar de ligne qui va être vendu à 80 ou 100 euros le kilo. Et de l'autre côté, je vais prendre l'exemple du poisson, entre guillemets, le plus industrialisé du monde, qui est le surimi. Et bien en fait, quand on compare le prix du kilo de poisson, on a quelque chose d'à peu près équivalent. Et ça c'est dingue, puisque le surimi va être vendu entre 5 et 20 euros le kilo, alors que ça va être du... Déjà, ça ne concerne que 30% de poissons, et le poisson qui est dans le surimi, c'est du tacaud, c'est du merlan bleu. En gros, le merlan bleu quand vous l'achetez au marché, ça coûte 5 euros le kilo. Et donc là, vous avez payé votre surimi avec 30% de merlan bleu entre 5 et 20 euros le kilo. Et donc, quand vous rapportez ça au prix du kilo de poisson, vous arrivez au prix du bar de ligne à Paris. La pêche industrielle peut coûter très cher et la pêche artisanale, au contraire, vous pouvez trouver du merlu de ligne, du maquereau de ligne, du merlan bleu de ligne ou du tacaud de ligne à 5, 10, 15 euros le kilo qui est totalement abordable quand on compare ça avec n'importe quel autre poisson en grande distribution.
Marceau : Vous parliez tout à l'heure de responsabilités politiques plutôt que des consommateurs. On aurait aimé que vous fassiez part de vos espoirs sur de nouvelles règles européennes en matière de pêche. A propos de la réforme, par exemple de la Politique commune de pêche.
Frédéric LE MANACH : Nos espoirs restent maigres, malheureusement. On le voit, jour après jour que la Commission européenne est beaucoup trop proche des lobbies industriels. Malheureusement, peu de parlementaires sont aussi au courant des enjeux de société et sont prêts à se battre. On en a, heureusement. Que ce soit sur nos combats contre la pêche profonde ou la pêche électrique, sans certains députés, comme Younous Omarjee ou Yannick Jadot ou Pascal Durand, on n'aurait rien obtenu. C'est eux aussi qui arrivent à porter la parole des citoyens auprès des institutions européennes, donc heureusement qu'on a ces quelques députés qui combattent à nos côtés. Mais c'est vrai qu'on a aussi, malheureusement, de l'autre côté de la force qui est présent au sein du Parlement européen, avec des députés comme par exemple l'Espagnol Gabriel Mato, qui est dans tous les coups fourrés de l'industrie et qui est vraiment notre ennemi au sens propre du terme. Et après, on a l'autre codécideur politique européen qui est le Conseil de l'Union européenne avec les ministres concernés des différents Etats membres auxquels on n'a pas du tout accès. Ce sont des discussions qui sont faites en catimini, il n'y a pas d'observateurs, il n'y a pas de rapport d'observation. De toute façon, nous on a pas accès non plus aux ministres pour faire du plaidoyer.
Donc, c'est vrai qu'on se bat avec les armes qu'on a, qui sont faibles par rapport aux armes du camp adverse. On a nous, nos outils, notre force de frappe citoyenne, nos quelques députés qui nous soutiennent, 10.000 euros pour payer le train, un hôtel et des frais de restaurant quand on est à Bruxelles quelques jours par an. Mais par exemple, en 2020, on n'a pas du tout été à Bruxelles. Et de l'autre côté, vous avez des organismes qui, jour après jour, sont présents à la Commission européenne, au Parlement européen, qui ont leurs entrées au Conseil de l'Union européenne auprès des ministres, qui ont des moyens financiers colossaux par rapport aux nôtres et qui mentent, qui trichent, qui dénigrent l'adversaire, qui demandent leur radiation. Et donc, malheureusement, je ne peux pas vous donner beaucoup d'espoir par rapport aux futures politiques de l'Europe, parce que nous, les sujets sur lesquels on travaille, on voit très bien que ça n'avance pas et que les lobbies se servent vraiment par exemple de la Commission européenne comme paillasson. C'est violent comme propos. Ça, c'est un gros problème qui ne nous donne pas beaucoup d'espoir par rapport au futur.
Marceau : Merci beaucoup de nous avoir accordé cette interview et on vous souhaite une bonne année 2021.